Publié le 29/06/2017
Les pouvoirs publics mènent, depuis plus de quarante ans, un combat sans relâche contre l’insécurité routière, avec, jusqu’ici, un succès certain. En 1972, on dénombrait plus de 18 000 victimes de la route et alors même que le nombre de véhicules avait triplé pendant la période, ce chiffre n’avoisinait plus que 3 477 en 2016.
Les principales raisons de cette évolution positive sont dues aux constantes progressions technologiques des véhicules, aux actions de sensibilisation et de prévention, particulièrement auprès des publics les plus touchés comme les jeunes, ainsi qu’au durcissement des contrôles.
Cette avancée sociétale incontestable ne doit néanmoins pas masquer la nécessité d’une vigilance permanente en la matière, comme l’a montré la recrudescence de la mortalité routière en 2014. Ce constat avait alors poussé le gouvernement à réactiver le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR).
Parallèlement aux éternelles causes d’accident que sont la vitesse et l’alcool, de nouveaux risques apparaissent avec l’évolution de la société : 59 % des Français reconnaissent, par exemple, utiliser leur téléphone mobile en conduisant, tandis qu’on constate un relâchement coupable du port du casque à moto et de la ceinture de sécurité en voiture. Les campagnes de prévention se heurtent en permanence à l’expérience du conducteur qui transgresse les règles sans pour autant devenir une victime de la route : les Français commettent en moyenne neuf infractions sur un même trajet. Pour remédier à cet état de fait inquiétant, tous les leviers doivent être actionnés.
Première cause d’accident mortel au travail, les employeurs doivent être sensibilisés à l’insécurité routière. Jusqu’à la loi de modernisation de la justice de 2016, l’employeur pouvait refuser de donner le nom du conducteur qui commettait une infraction au volant d’un véhicule professionnel. L’entreprise assurait alors le paiement de l’amende, mais aucun point de permis n’était retiré. Depuis le 1er janvier dernier, les employeurs sont tenus de révéler l’identité du salarié fautif. Même si certains se sont émus de voir l’employeur ainsi érigé en délateur, il est néanmoins impossible de laisser s’installer une forme d’impunité lors des déplacements professionnels.
D’autres avancées dans la réglementation et dans le contrôle sont ou vont être mises en place. Les accidents de la route étant la première cause de mortalité et de handicap chez les 18-25 ans, le taux d’alcoolémie légale a été abaissé à 0,2 g/l pour les jeunes conducteurs. Les pouvoirs publics espèrent aussi beaucoup de la mise en place des radars leurre, de la privatisation de la conduite de voitures-radar et de la généralisation de la vidéo-verbalisation pour faire reculer les excès de vitesse, délits responsables d’un accident de la route sur trois. Les bonnes idées sont aussi à chercher à l’étranger. Fin avril, le Royaume-Uni, comme l’ont déjà fait la Suède ou la Finlande, a opté pour un système de verbalisation proportionnel en matière d’excès de vitesse : plus les revenus sont élevés, plus l’amende augmente. Il est, en effet, évident qu’une amende de 90 euros n’a pas la même signification pour tous les conducteurs et que cette progressivité la rend beaucoup plus dissuasive.
Mais l’amélioration de la sécurité des usagers ne passe pas uniquement par la répression. L’état des routes est, par exemple, un autre enjeu crucial pour la France dont le réseau est le plus dense d’Europe et le plus coûteux à entretenir. Or, les crédits alloués à cette mission de première importance sont en nette diminution, ces dernières années. La qualité des 9 645 kilomètres de routes nationales commence à en subir les conséquences.
Pour tous ces combats, l’État n’est néanmoins pas seul en première ligne, les administrations locales ont aussi un rôle clé à jouer. Certaines villes françaises de plus de 100 000 habitants comme Villeurbanne, Tours ou Brest sont parvenues à atteindre l’objectif « zéro victime », deux années consécutives. Diverses politiques ont été mises en oeuvre : préventions auprès des publics scolaires, aménagements urbains ou durcissement de la réglementation pour protéger cyclistes et piétons, victimes croissantes de l’insécurité routière.
Du fait de pénalités financières parfois lourdes pour les particuliers et parce qu’elle prétend réguler en profondeur les comportements individuels, la Sécurité routière fait toujours l’objet de contestations, voire de campagnes de dénigrement. Mais, outre le prix humain, le coût économique de l’insécurité routière est particulièrement élevé : 32,8 milliards d’euros pour l’État en 2015, près de 6 millions de journées de travail perdues pour les entreprises. Parce que notre vie en commun repose sur le principe de solidarité et de protection des victimes, il est indispensable que l’État mène une politique ambitieuse en matière de diminution des accidents de la route. Non seulement pour notre bien, mais aussi pour la pérennité de notre modèle de société.