Publié le 16/06/2017
LE CERCLE/POINT DE VUE – En crise, le secteur agricole français doit enrayer la spirale infernale. De nombreuses solutions s’offrent à lui.
Depuis la Libération, l’agriculture française a relevé de nombreux défis : la mécanisation, l’intensification de la production, l’ouverture des marchés, la recherche de gains de productivité. Plus tard, les exploitants ont dû s’adapter aux réformes de la Politique agricole commune (PAC), aux exigences environnementales.
La fin des paysans ?
Le XXIe siècle marquera-t-il la «fin des paysans» comme le prophétisait le sociologue Henri Mendras en 1967, ou au contraire l’aube d’une nouvelle ère ? Pour les spécialistes, la crise agricole est une crise de marché. Celle-ci se caractérise par un déséquilibre entre l’offre et la demande, la fermeture de marchés à l’exportation, de mauvaises récoltes de céréales et une baisse tendancielle de la consommation de viande et de lait.
S’y ajoutent des facteurs plus spécifiques à la France comme des coûts fixes qui varient de manière très forte d’une exploitation à une autre et des charges sociales plus élevées qu’ailleurs.
La grande distribution, dont l’attitude est souvent décriée à tort, pointe un manque d’organisation collective et d’adaptation de la production aux besoins. Les enseignes ont dû par exemple, importer deux tiers de leur porc bio (qui rapporte trois fois plus à son producteur), en raison de l’insuffisance de la production nationale.
Comment enrayer cette spirale ? Une forme de consensus se dessine autour de quelques pistes. Celles-ci visent en priorité à mettre fin au dogme des prix bas, à engager un «choc de simplification» dans le domaine agricole, à mieux évaluer les conséquences des normes, à renforcer l’harmonisation des règles sociales européennes, à garantir la «vérité des prix» de manière à savoir quelle part de la valeur ajoutée revient à qui. Il s’agit en outre d’adapter la production aux attentes des consommateurs.
Du bio, des circuits-courts, des robots…
À cet égard, la France comptait en 2016, 1.065.000 d’hectares certifiés bio contre moins de 500.000 en 2006. Aussi, un peu plus de 500.000 hectares supplémentaires sont en voie de certification. Au total, environ 32.000 exploitations se sont converties au bio auxquelles s’ajoutent 15.000 transformateurs et opérateurs.
Même s’ils ne répondent qu’à une partie de la demande, les circuits-courts connaissent un réel renouveau, sous diverses formes : vente directe à la ferme ou sur les marchés, dans les magasins de producteurs ou sur internet. Mention spéciale à la société Biolait qui collecte 150 millions de litres dans 70 départements, tout en garantissant un prix attractif à ses producteurs.
Pour réduire leur endettement, les exploitants peuvent compter sur les coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA). En plus d’employer 4.800 salariés, leur parc, très diversifié, répond à la quasi-totalité des besoins. Enfin, certains agriculteurs ont choisi de diversifier leurs revenus, soit en produisant des énergies renouvelables, soit en proposant des chambres d’hôte.
L’agriculture de demain gagne progressivement en consistance. Des pôles de compétitivité mettent en relations chercheurs, pouvoirs publics et agriculteurs. Après la mécanisation, l’agriculture vit une nouvelle révolution, celle de la robotisation. Si des robots sont déjà présents dans les exploitations, par exemple dans l’élevage, la nouveauté concerne l’utilisation de capteurs embarqués et d’outils connectés.
Des dispositifs qui permettent d’intervenir de manière modulée, en fonction des parcelles et des conditions climatiques. D’autres approches, comme les techniques culturales sans labour (TCSL) ou l’introduction de micro-organismes, respectent la qualité des sols et réduisent les intrants.
Sans parler de nouvelle ère, certaines des tendances actuelles correspondent à autant d’espoirs pour des exploitants qui, en récompense de leur travail, ne demandent qu’une chose : la dignité.